Le Juif errant

 

Je suis le juif errant*, celui qu'on agonise,

Capitaine Dreyfus, l' Hertzel qu'on ironise.

Celui dont on ne parle pas, car il dérange,

Qui doit, ainsi, rester très sage pour qu'on n'y pense !

 

Quatre mille ans que ça dure, j'ai appris à me taire,

Nous sommes enfants mûrs, certains disent un peu fiers.

Ma fierté n'est jamais que mon humanité

La vie que j'aimerais pour ma communauté.

... ...

Chasse-moi, je reviens car je me dois de vivre,

Mon âme se souvient de Môché et du livre !

Trop de coups m'ont appris à ne craindre la peur,

Et combien de mépris et combien de douleurs !

... ...

Car à trop me frapper, car à trop me haïr,

Car à trop me moquer, car à trop me salir,

Je me suis redressé, j'ai relevé le dos,

Et puis dans ma fierté, me suis reconnu beau.

 

Ne frappe jamais trop, là où cela fait mal,

Trop taper sur mon dos me crée un idéal,

Idéal de pitié, mes frères ont trop souffert,

Idéal de piété, je reconnais mes pères.

 

Ne me chasse jamais, telle ta bonne conscience,

Car toi Homme que j'aime, ne renie mon enfance,

Ton enfance est à toi, mon enfance est la mienne,

Aussi joignons nos voix afin que l'amour vienne !

... ...

*selon la tradition il s'appelait Assuérus et était cordonnier.

A vous, Monsieur qui avez su me dire :

Pourquoi m'accable-t-on lorsque je me défends,

alors qu'on sait me plaindre quand on me persécute !

 

Paris, le 8 août 1997

 

 

 

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